Le Centre pour l’intégrité sociale
2019 Lauréat
Myanmar
« Ce Prix reconnaît que le changement peut provenir de l’intérieur, et que ce qui commence comme une petite initiative locale peut devenir un mouvement fort et significatif. C’est une grande réalisation de pouvoir représenter des Rohingyas qui se battent pour la tolérance et le pluralisme de concert avec des personnes d’ethnies et de religions différentes. J’espère qu’un jour, la diversité au Myanmar ne sera pas seulement acceptée, mais célébrée. »
Aung Kyaw Moe, directeur général du Centre pour l’intégrité sociale
L’histoire du Centre
Aung Kyaw Moe rêve du jour où les habitants de son pays, le Myanmar, percevront la diversité comme une source de force plutôt qu’une source de conflit, où les inégalités seront résolues et où les groupes minoritaires seront enfin inclus de façon significative dans les sphères sociale, économique et politique.
Armé de sa vision, en 2016, Aung Kyaw Moe a réuni une équipe diversifiée pour fonder le Centre pour l’intégrité sociale (CSI). Son objectif est de bâtir, au Myanmar une société non discriminatoire et inclusive dans laquelle le pluralisme est valorisé. Le CSI travaille avec des jeunes de régions touchées par le conflit en développant leurs compétences et en leur offrant les occasions nécessaires pour bâtir une société pacifique et pluraliste.
Pour créer un avenir sans conflits, le CSI cultive une génération de jeunes leaders tournés vers le pluralisme. Le CSI offre aux jeunes des formations sur la sensibilité au conflit, la cohésion sociale et la consolidation de la paix. Seul projet en son genre au Myanmar, il s’agit souvent de la première occasion qu’ont les jeunes d’interagir avec des personnes de religion ou de groupe ethnique différents des leurs. Déjà, ces jeunes leaders sont devenus de puissants agents de changement dans leur communauté, où ils aplanissent des tensions, font de la médiation de conflit et répandent un message de respect de la diversité.
L’organisme a été fondé par Aung Kyaw Moe – un professionnel humanitaire Rohingya. Les employés et les parties prenantes du CSI proviennent tous des mêmes régions que les jeunes participants. Ce leadership hautement localisé permet au personnel du CSI d’avoir une compréhension profonde des conflits entre différentes communautés et un accès aux communautés auxquelles d’autres organisations de consolidation de la paix et ONG internationales ne peuvent accéder. Cela leur permet de travailler avec des personnes qui pourraient autrement hésiter à se faire aborder.
Cette position unique a été particulièrement cruciale en 2017, quand le déclenchement d’un conflit a forcé près de 700 000 Rohingyas à fuir leur foyer dans le nord de l’État de Rakhine, au Myanmar, pour se réfugier au Bangladesh. Le CSI a fait partie des rares organisations ayant un accès aux communautés touchées par le conflit et possédant une profonde compréhension de la longue agitation sociale. Dans le passé, diverses ONG et agences de l’ONU ont été accusées de partialité dans l’offre de leur aide humanitaire, ce qui a exacerbé les tensions dans la région. Le CSI a offert une aide humanitaire tout à fait impartiale. Malgré le caractère délicat de cette entreprise, l’organisme a offert de l’aide à quiconque en avait besoin, quelle que soit son ethnie ou sa religion. En seulement trois mois, le CSI a pu atteindre 80 000 personnes. En répondant aux besoins humains sans préjugé, le CSI a démontré que sa compassion n’a aucune limite et que son respect pour la dignité humaine transcende toute division.
Aung Kyaw Moe comprend que pour assurer une paix durable au Myanmar, les attitudes à l’égard de la diversité doivent changer. Le CSI rend cela possible en habilitant les jeunes leaders de diverses communautés à entrer en dialogue et à devenir des agents de changement dans leur communauté. Cette nouvelle génération de penseurs pluralistes peut aider à créer une société qui est non seulement sans danger, mais qui est également vibrante et cohésive, et ce, non pas malgré sa diversité, mais grâce à elle.
Avec plus de 135 groupes ethniques, 110 langues et un vaste éventail de religions, le Myanmar est un pays incroyablement diversifié. Colonie britannique pendant plus de 100 ans, le pays a déclaré son indépendance en 1948, mais a été dirigé par une série de gouvernements militaires jusqu’en 2011. La transition du pays vers la démocratie a été marquée par des troubles sociaux généralisés ainsi que par des persécutions ethniques et religieuses. La discrimination historique à laquelle sont confrontés les groupes minoritaires a entraîné des griefs et enfin, de la violence sectaire. Ces troubles sont considérés comme étant la plus longue guerre civile au monde.
Les Rohingyas, une minorité musulmane apatride au sein d’un pays largement bouddhiste, font partie des groupes persécutés au Myanmar. Le gouvernement du pays leur refuse la citoyenneté, déclarant qu’ils sont des immigrants illégaux venant du Bangladesh, même si plusieurs d’entre eux sont là depuis des générations. Le Bangladesh nie également qu’ils sont ses citoyens. Les déplacements et l’accès à l’emploi des Rohingyas sont extrêmement limités. Ils ont été victimes d’atrocités de masse aux mains des militaires et ont été forcés de s’enfuir.